Se reconnecter à la nature à l'ère du digital - visite à l'Observatoire de la Fondation Yves Rocher - Marine Leroy

Se reconnecter à la nature

Retisser le lien à la nature

Alors que plus de la moitié de la population mondiale vit en ville et que la distance avec les zones naturelles s’étire d’année en année, la relation de l’homme à la nature s’est dégradée. Pourtant, à l’ère de la révolution digitale, se reconnecter à la nature semble la solution au mieux-être de l’homme moderne, mais aussi à celui de la planète. Décryptage.

La perte du lien au vivant

Une perception biaisée de notre environnement

Selon une approche écopsychologique, l’érosion du lien entre l’homme et la nature serait l’explication de l’état actuel de notre planète. En considérant le vivant comme une chose extérieure qu’il domine, l’humain s’est petit à petit déconnecté de la nature jusqu’à ne plus la ressentir, et même jusqu’à oublier qu’il faisait partie intégrante de l’écosystème. Selon William Cronon, historien de l’environnement, dans son essai « Going Back to the Wrong Nature », la société occidentale aurait cette même perception biaisée de la nature, qui commencerait là où le monde humain s’arrête : « Si nous nous permettons de croire que la nature, afin d’être vraie, doit également être sauvage, alors, notre présence même en son sein représente sa chute. L’endroit où nous sommes est l’endroit où la nature n’est pas. » Ce dualisme serait alors alimenté par des croyances au détriment des connaissances sur l’environnement.

Une vision purement économique de la nature

À force de considérer la nature comme une ressource exploitable, les humains entretiennent une relation déséquilibrée avec leur environnement. Dans un rapport publié en juillet 2022, l’IPBES (Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques) alerte sur notre vision biaisée des valeurs de la nature et met en lumière la nécessité de ne plus la considérer comme une source de profit. Ana María Hernández Salgar, présidente de l’IPBES, le souligne : « La biodiversité se perd et les services que la nature rend aux populations se dégradent plus rapidement aujourd’hui qu’à tout autre moment de l’histoire de l’humanité. Cela est dû en grande partie au fait que notre approche actuelle des décisions politiques et économiques ne tient pas suffisamment compte de la diversité des valeurs de la nature. » Cette étude met notamment en lumière la nécessité de redéfinir les notions de « développement » et de « qualité de vie », dans l’objectif de reconsidérer la nature dans sa globalité et de mieux prendre en compte les services rendus par les écosystèmes. 

L’éloignement géographique de la nature

Selon les résultats d’une étude franco-allemande menée en 2022 par l’université de Leipzig et le CNRS dans la revue scientifique « Frontiers in Ecology and the Environment », l’essor de l’urbanisation et le développement de l’agriculture intensive ont contribué à éloigner nos lieux de vie des zones naturelles. Ainsi, la distance moyenne serait de 9,7 km, soit 7 % plus loin qu’en 2000. Bien que le constat soit mondial, c’est en Europe et en Asie de l’Est que cette distance moyenne est la plus élevée, avec 22 km en Allemagne et 16 km en France métropolitaine.

Une autre étude récente, menée par une équipe de chercheurs américains du NIST (National Institute of Standards and Technology) pointe la corrélation entre le développement des villes et de mauvaises connaissances écologiques, générant moins d’actions environnementales. Ainsi, Payam Aminpour, auteur principal de l’étude, souligne : « Nous émettons l’hypothèse que l’urbanisation n’a pas seulement un impact sur la dimension écologique du système, mais aussi sur la dimension sociale du système, ce qui peut, à son tour, amener les gens à se désengager des enjeux environnementaux et les bloquer dans l’adoption de comportements vertueux en faveur de la protection de la nature ».

Se reconnecter à la nature à l’ère numérique

La virtualisation du monde

Dès 2005, dans son ouvrage « Last Child in the wood », Richard Louv évoquait le concept de « trouble de déficience en nature » au cœur de nos sociétés modernes. Il y dénonce notamment le temps passé devant les écrans au détriment des activités extérieures, l’éloignement des enfants de la nature et l’impact néfaste de ce trouble sur la santé physique et mentale des jeunes générations. Ce phénomène s’expliquerait principalement par l’accès de plus en plus restreint aux espaces verts dans les zones urbaines, l’anxiété grandissante des parents à laisser sortir leurs enfants et l’essor de la digitalisation facilitant l’accès au numérique sous toutes ses formes.

Selon le dernier baromètre « Hyperconnexion et santé » mené par l’institut de sondages BVA, les Français passent en moyenne 4 h 49 sur leurs écrans et les cadres 7 h 13. Le nombre d’appareils connectés à domicile dans les pays de l’OCDE aurait également quintuplé entre 2012 et 2022 (passant de 10 à 50). Le constat est le même au sein des entreprises : 10 % des salariés seraient exposés à un risque de surcharge mentale et de fatigue liée à une quantité excessive de mails et de réunions entraînant une surconsommation d’écran. En plus de favoriser la sédentarisation, l’omniprésence du numérique contribue à la montée en puissance de multiples troubles liés à nos modes de vie actuels : maladies cardiovasculaires, obésité, diabète de type II, dépression, anxiété et stress, fatigue mentale…

Le sevrage numérique pour se reconnecter à la nature

Et toutes les études le prouvent, l’usage des technologies numériques encourage l’anxiété, la dépression, les troubles de l’attention, sans oublier le phénomène de dépendance à internet et aux écrans. L’une des causes principales de cette addiction est l’altération physique du cerveau au niveau structurel. David Strayer, chercheur et professeur de neurosciences cognitives à l’Université de l’Utah, a démontré que l’usage d’internet et des réseaux sociaux affecte certaines parties du cerveau préfrontal, centre de commandement du cerveau, les rendant alors incapables de planifier, hiérarchiser et prioriser des tâches. À l’inverse, nos fonctions cognitives retrouvent leur pleine capacité lorsque l’on se retrouve dans un environnement naturel, tout en diminuant le niveau de stress. Nous sollicitons alors davantage notre créativité, notre réflexion et nos capacités d’argumentation et de productivité. En ce sens, cette désintoxication induit de reprendre le contrôle des outils numériques avec davantage de discernement, sans pour autant y renoncer.

L’éducation à l’environnement

À l’heure du tout numérique, cette prise de conscience de la nécessaire reconnexion à la nature reste toutefois complexe. Pour Bruno David, président du Muséum national d’histoire naturelle à Paris et membre du Conseil d’Administration de la Fondation Yves Rocher, notre niveau de curiosité et de connaissance du réel aurait diminué au profit du virtuel : « Nous sommes de plus en plus dans une amnésie culturelle face au reste du vivant. » L’importance de retrouver le lien à la nature est pourtant essentielle d’un point de vue sanitaire comme écologique, et à ce titre, l’éducation à la nature joue un rôle indispensable dans ce projet de transformation sociale et écologique. Alors que les scientifiques et les enseignants alertent sur l’érosion de la transmission des savoirs aux plus jeunes, des projets d’éducation et de sensibilisation à la nature voient le jour pour pallier ce déficit de programmes dédiés aux enjeux écologiques : ateliers environnementaux, « classes dehors », « jardins d’éveil en forêt », etc. C’est ce que la Fondation Yves Rocher a souhaité proposer en créant un projet d’Observatoire de la biodiversité sur le site de la ferme de Villeneuve, à proximité de La Gacilly en Bretagne. Cette prairie humide de 8 ha, réhabilitée grâce à des actions de restauration, est ouverte au grand public qui peut s’y promener et découvrir l’extraordinaire terrain de jeu de la faune et de la flore locale. 

Découvrez l’Observatoire de la biodiversité

Le numérique au service de la nature

Cette tendance à l’hyperconnexion, intimement liée à la course à la performance de nos sociétés, s’associe paradoxalement à la volonté citoyenne de rester connecté à la nature, dans un objectif de préservation de l’environnement et de la santé humaine.

Les sciences du numérique font monter en compétences les citoyens et l’utilisation des outils digitaux est un véritable avantage pour faire avancer le travail de la recherche : sciences participatives, Open Data, projets collaboratifs, Civic Tech… Ces initiatives au service de la nature permettent à l’homme de se ré-ancrer avec son environnement local, d’observer, d’apprendre et de transmettre. Selon une étude publiée dans la revue britannique « People and Nature » en février 2023, des volontaires participant à des projets de sciences participatives en vue de collecter des données sur la biodiversité (comptage d’insectes pollinisateurs, de papillons ou observation de la nature) ont amélioré leur bien-être et leur lien avec la nature. Et la plupart des participants ont déclaré être plus susceptibles d’adopter des gestes écologiques après leur participation.

C’est également ce qu’a voulu démontrer la Fondation Yves Rocher en s’associant avec le géant du numérique Microsoft, dans le cadre de la création d’un univers dédié au programme PlantForLife dans le jeu vidéo Minecraft. L’objectif de cette association était de sensibiliser les plus jeunes à l’enjeu de la déforestation : chaque arbre planté virtuellement est ensuite réellement planté par la Fondation Yves Rocher dans l’un de ses sites de plantation.

« Il est essentiel de renouer une relation profonde à la nature. Sensibiliser à la cause de l’arbre les jeunes générations est indispensable. Ce partenariat avec Microsoft est une belle opportunité de nous adresser au plus grand nombre. L’union fait la force »

Jacques Rocher
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