Cléofécélia est une paysanne péruvienne qui s’est construit un parcours hors-normes. Amoureuse de sa terre et de sa culture, la lauréate de l’International Award Terre de Femmes de la Fondation Yves Rocher s’est lancée dans un travail titanesque pour répertorier, préserver et diffuser les connaissances en matière de graines et de semences locales et ainsi, sauver tout un pan du patrimoine végétal et culturel des Andes.
Cléofécélia est une femme, à la fois simple et multiple. Née dans une famille paysanne pauvre dans le village de Chinchero, sur les routes menant au Machu Picchu, au Pérou, elle est, aujourd’hui à 61 ans, leader de sa communauté, paysanne, défenseuse de l’artisanat et des savoir-faire locaux, Cette récompense vient saluer son action de récolte, conservation et partage des graines des Andes.
Semer des graines ensemble pour demain
Le sujet des semences et des graines est crucial, Cléofécélia, ardente défenseuse du patrimoine indigène le sait bien. Depuis toujours, Les Andes sont un berceau de l’agriculture vivrière. L’exploitation de ces petites parcelles accrochées à flanc de montagne est une véritable prouesse nécessitant une connaissance et une maîtrise parfaites de cet environnement difficile pour développer des cultures capables de s’adapter au climat et aux sols. L’introduction de nouvelles semences lors de la conquête espagnole, puis de la modernisation de l’agriculture ont contribué au recul des cultures andines essentiellement constituées de céréales et tubercules dont les qualités nutritionnelles sont indéniables.
Défendre les semences nourricières
Ces changements ont un impact économique et social dramatique sur les producteurs et les communautés locales mais aussi sur la santé de la population qui se tourne vers les produits proposés par l’industrie agroalimentaire. La farine locale, par exemple, est en train de disparaitre face à la concurrence de celle fabriquée industriellement à Lima ou Arequipa, avec du blé importé.
Préserver la biodiversité locale
La prise de conscience de l’urgence à agir est provoquée en 2011, par le projet de construction d’un aéroport international au cœur du village de Chinchero. Le programme exproprie Cléofécélia et menace le territoire de trois communautés indigènes, de nombreux sites archéologiques ainsi que l’équilibre écologique local. Avec son caractère bien trempé, sa détermination à toute épreuve et son enthousiasme en bandoulière, Cléofécélia a décidé d’agir pour la préservation des graines gardiennes du patrimoine nourricier et de la biodiversité. Elle réussit à mobiliser les communautés pour diffuser, et partager les savoir-faire ancestraux en matière de semences et de technologies agricoles. Cette femme, déscolarisée à l’âge de 14 ans, a ainsi répertorié minutieusement les graines autochtones comme celles de Maca, pikoll, amarante ou de près de 1334 variétés de pommes de terre. Elle a ensuite enregistré les caractéristiques et les propriétés de chacune de ces semences. Attachée à la nécessité de transmettre, Cléofécélia veut aller plus loin en créant un lieu de rencontre et de partage autour de ces graines et de l’art de prendre soin de la biodiversité des Andes.
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